Le législateur fiscal a prévu la possibilité pour les contribuables de reporter ou d’imputer le déficit fiscal d’un exercice antérieur sur les exercices ultérieurs. Concrètement, il s’agit de transformer un déficit fiscal, c'est-à-dire le résultat négatif issu de la détermination du résultat fiscal au cours d’un exercice, en une charge extracomptables théoriquement rattachable aux exercices ultérieurs. Sa mise en œuvre s’opère par l’imputation de manière extracomptable du déficit antérieur à concurrence du résultat fiscal bénéficiaire. C’est une faveur à laquelle les contribuables ont couramment recours.
Toutefois, pour une utilisation optimale des déficits reportables, il convient de bien cerner les bonnes pratiques en matière de modalités d’imputation, de restrictions ou limites à leur imputation. À cet effet, il importe surtout en cette période fiscale de partager avec nos clients quelques bonnes pratiques, à adopter dans le cadre de la détermination du résultat fiscal, pour une utilisation optimale des déficits reportables.
- En identifiant clairement le déficit fiscal utilisable
Il convient d’abord de clarifier que le déficit fiscal doit être distingué du déficit comptable calculé à partir des seules écritures comptables, sans aucun retraitement fiscal des charges et des produits. Le déficit fiscal résulte de l’écart négatif constaté lors de la détermination du résultat fiscal de l’exercice entre les produits et les charges fiscalement admises. Le caractère bénéficiaire ou déficitaire d’un exercice doit s’apprécier par référence au résultat comptable augmenté des réintégrations extracomptables de charges fiscalement non déductibles et diminué des déductions extracomptables de produits fiscalement non taxables, avant prise en compte des déficits des exercices antérieurs.
Aussi, dans l’optique de disposer de la traçabilité du stock de déficit disponible, il convient de dresser un état récapitulatif de constitution et d’imputation des déficits reportables.
- En transformant le déficit fiscal de l’exercice en Amortissements Réputés Différés (A.R.D) et en Déficit Fiscal Ordinaire (D.F.O)
Lorsque le résultat fiscal de l’exercice est déficitaire, la loi permet à la société de différer les amortissements régulièrement comptabilisés (c'est-à-dire conformes aux règles de déductibilité fiscale des charges d’amortissements) au titre dudit exercice. C’est le déficit fiscal ainsi constitué du déficit ordinaire de l’exercice et des amortissements de l’exercice déficitaire, réputés différés qui seront reportables sur les exercices ultérieurs.
En résumé, le déficit reportable est constitué :
- du déficit fiscal ordinaire de l’exercice et des amortissements de l’exercice réputés différés de l’exercice,
- du déficit fiscal ordinaire antérieur non atteint par la forclusion,
- des amortissements réputés différés créés au titre des exercices antérieurs.
- En respectant l’ordre d’imputation des déficits reportables
L’imputation des déficits est organisée par le Code général des Impôts qui précise ses modalités et limites.
Il ressort des dispositions dudit Code que le résultat fiscal est déterminé par la réintégration des amortissements de l’exercice déjà comptabilisés, lorsque l’exercice est déficitaire (pour les différer dans la perspective d’un exercice bénéficiaire), ou par la déduction des déficits ordinaires des exercices antérieurs non atteints par la forclusion, puis des amortissements réputés différés des exercices antérieurs, lorsque l’exercice est bénéficiaire.
Sur cette base, une société qui affiche un résultat déficitaire doit en principe imputer ses déficits fiscaux reportables suivant un certain ordre établi comme suit :
- Première étape : différer partiellement ou intégralement les amortissements normaux de l’exercice à hauteur du déficit fiscal de l’exercice.
- Deuxième étape : imputer les déficits ordinaires encore reportables.
- Troisième étape : imputer les amortissements réputés différés au cours des exercices antérieurs déficitaires
Nous signalons qu’en cas de réalisation de dépenses agréées à la réduction d’impôt pour investissements de bénéfices au Sénégal, leur imputation, dans le délai prévu, sera effectuée en dernier lieu après celle du report déficitaire ordinaire et des ARD.
- En respectant le délai d’imputation des déficits fiscaux reportables
Il faut distinguer selon qu’il s’agit du déficit ordinaire ou des amortissements réputés différés.
Le déficit fiscal est reportable successivement sur les trois exercices suivant l’exercice déficitaire. Au-delà de ce délai de trois ans, la société perd le droit de reporter et d’imputer le déficit. Cette limitation ne s’applique pas à la quote-part du déficit correspondant aux amortissements régulièrement comptabilisés mais réputés différés en période déficitaire. En effet, pour cette catégorie de déficit, le délai de report est illimité dans le temps.